Savoir se recentrer pour se re-déployer, entreprendre et innover !
Jean-Maurice M. Directeur d’une PME dans l’aménagement
JDV : Comment s’est passée cette période d’adaptation et comment avez-vous pu prendre soin de vos équipes ?
J-M.M. : J’ai des relations régulières avec PÔLE SANTÉ TRAVAIL, et je suis sensible au sujet de la santé donc, globalement, nous avions déjà un bon niveau de culture générale dans mon entreprise. On ne peut pas dire que nous étions préparés au confinement mais nous avions déjà une culture d’entreprise qui nous a permis de construire une réponse rapidement. Et nous avons finalement assez bien vécu cette période.
L’équipe communique tout le temps. Et on sait bien qu’en situation de crise la communication est clé. J’avais pris conscience, pour plein de raisons, de la gravité de la situation quelques jours avant l’annonce du confinement. Les gestes barrières je les avais imposés bien en amont. Cela avait peut-être semblé étrange aux ouvriers, mais lorsque la crise a été confirmée par les médias, mon autorité s’était naturellement installée.
JDV : Est-ce que vous avez profité de cette crise pour vous réinventer et réfléchir à de nouvelles solutions ? Comment cela s’est passé ?
J-M.M. : La crise nous a forcé à nous arrêter. Lorsqu’on s’arrête on a le temps de penser. On a le temps aussi de rencontrer des gens et d’échanger. J’ai observé mon entreprise à l’arrêt et sur le plan concret j’ai pu observer les choses qui n’allaient pas chez nous dans nos installations et ce qu’on pouvait améliorer. On dit toujours que le cordonnier est le plus mal chaussé et, dans notre cas par exemple, d’un point de vue sanitaire, nous n’étions pas à niveau. Le coronavirus nous a imposé d’être impeccables au niveau sanitaire. Il a fallu monter en gamme. J’ai donc créé une pharmacie, une pièce dédiée à tout ce qui touche aux soins. Ensuite nous avons fait des sanitaires impeccables pour les ouvriers. Nous avons aussi fait des toilettes dames à l’atelier puisque nous avons des femmes au sein de l’équipe désormais.
Nous nous sommes ensuite dit : l’aspect sanitaire est amélioré chez nous et pour nos équipes, il faut que ça le soit aussi pour nos clients. L’aspect sanitaire est désormais capital et, quelle que soit l’activité, en tant qu’entrepreneur, il faut adopter un marketing sanitaire pour rassurer tous ceux avec qui l’on travaille : salariés, fournisseurs, clients.
JDV : Et vous développez un projet autour de ça ?
J-M.M. : Oui le deuxième sujet ce sont les restaurants pour lesquels nous travaillons. Ils ont tous été arrêtés par décret. Nous avons donc fatalement nous aussi été obligés de nous arrêter. En regardant les informations, j’apprends qu’en raison de la fermeture des restaurants, certains producteurs de pommes de terre jettent leurs productions. Puisque finalement les restaurants représentent 50 % de l’écoulement de la production alimentaire. Et puis il y a des salariés qui sont au chômage, il y a aussi des gens qui sont en difficulté et qui ne parviennent pas à nourrir leurs enfants. Le coronavirus a donc cassé une chaîne alimentaire.
Je me suis demandé comment résoudre ce problème ? J’ai alors lancé un projet dont le but était de créer un cluster privé, de rassembler tous les acteurs économiques de notre territoire des Hauts-de-France, ceux qui produisent, ceux qui distribuent, ceux qui cuisinent, ceux qui fabriquent, ceux qui inventent, pour créer ensemble une réponse possible.
Et la réponse s’appelle la résilience, c’est-à-dire la capacité à bâtir une réponse dans une situation imprévue.
JDV : Cela veut-il dire que la crise peut être génératrice de nouveaux liens, de nouvelles idées, de nouveaux concepts ? C’est ce qu’on en retient ?
J-M.M. : Elle nous met un coup de pied aux fesses, elle nous sort de notre zone de confort, elle nous oblige à traverser la zone de peur et elle nous plonge dans une zone à explorer. Quand on explore, on trouve. Je n’aurais jamais eu cette idée sans la crise. Et puis, ce qui est génial, c’est que ça suscite l’enthousiasme.
JDV : Une dernière chose que vous retenez de la crise sanitaire ?
J-M.M. : Le message pour moi est assez simple. Il faut qu’on apprenne à maîtriser nos peurs. Aller dans l’inconnu, c’est faire face et surmonter ses peurs.
Aujourd’hui c’est le principal problème. Le virus a plongé tous les gens dans la peur avec un effet de sidération. Il a créé du désordre dans tous nos systèmes. Le but aujourd’hui c’est de se rallier, de se maîtriser, de s’organiser, pour construire ensemble et avec toutes nos ressources, et on en a plein, pour inventer de nouvelles choses et pour développer la résilience économique de notre territoire qui a déjà une histoire de résilience.
Il ne faut pas oublier que nous avons perdu le textile, la sidérurgie et le charbon dans notre région. Ces 3 arbres coupés ont fait arriver la lumière directement sur le sol, et il y a déjà des strates végétales qui se développent. Et c’est pour cela qu’on est capitale mondiale du design.
« Forts de cette résilience territoriale,
la crise sanitaire, finalement,
nous propose un scénario génial !
Tout est là pour en faire
quelque chose de magnifique ! »