Rencontre avec Élodie L. & Axelle T.
Équipe PÔLE SANTÉ TRAVAIL

Qu’est-ce que la toxicologie ?

La toxicologie est une discipline scientifique qui étudie les effets néfastes d’une source — molécule, radiation, nanomatériaux, etc… — sur des organismes ou des systèmes biologiques. Il y a plusieurs domaines dans la toxicologie : toxicologie médicale, toxicologie pharmaceutique, toxicologie environnementale, toxicologie industrielle…

Dites-nous en plus sur la toxicologie industrielle ?

La toxicologie industrielle, c’est notre domaine en tant qu’intervenants pour un service de santé au travail. En toxicologie industrielle, on s’intéresse surtout aux risques chimiques et aux expositions professionnelles. On intervient pour aller voir comment les gens manipulent les produits chimiques, et s’ils sont correctement protégés. Des produits chimiques il faut savoir qu’il y en a désormais partout et que tous les secteurs professionnels sont concernés.

Même dans les bureaux, il peut y avoir des risques chimiques liés à l’air qu’on respire, à une mauvaise ventilation, aux matériaux, du mobilier, des revêtements de sol, des moquettes, des peintures… Bien sûr les risques sont plus importants dans les entreprises qui fabriquent et qui manipulent ! Cependant il ne faut jamais négliger la toxicité liée aux matériaux, aux poussières… Sur le long terme la pollution intérieure peut avoir des effets sur la santé !

Et pour la toxicologie environnementale ?

C’est celle qu’on connait le moins bien aujourd’hui. Il y a des risques plus invisibles et on en découvre progressivement. On n’a pas encore toutes les études et toutes les connaissances sur les effets sur notre santé. Notamment parce qu’il y a des effets cocktails non maitrisés. Le risque pour la santé lié à la pollution de l’air n’est pas apparu. Mais il est mieux documenté maintenant et mis en avant.

Quand et comment intervenez-vous dans les entreprises ?

On intervient à la demande des équipes santé travail, ou des entreprises quand ils se questionnent sur des expositions ou quand des salariés présentent certains symptômes. Par exemple, dans les open space ou les bureaux : 
• le picotement des yeux,
• des allergies, des maux de tête, des crises
• d’éternuements.

Bien souvent les causes sont multi-factoriellesLa première recherche que l’on effectue c’est le niveau de dioxyde de carbone présent dans l’air car c’est un indicateur du confinement des locaux et de la qualité de la ventilation.

Découvrez les 8 conseils pour prévenir des risques dans les locaux et chez soi

REGARDER LA VIDÉO…

 

RAPPEL DES FONDAMENTAUX FACE À UN RISQUE CHIMIQUE POTENTIEL :

1. Identifier le risque

2. Évaluer les situations d’exposition et leurs conséquences potentielles (effets sur la santé

ou sur l’environnement…)

3. Supprimer le risque en arrêtant d’utiliser

le produit en question

4. Si la suppression est impossible, on peut réduire le risque avec la mise en place de

protection collective (par exemple, aspiration)

5. Si ces deux premières mesures ne sont pas suffisantes, une protection individuelle doit être mise en place (tenue, gants, masques etc…)

L’évolution des connaissances et techniques industrielles peut faire apparaître de nouveaux risques comme les nanoparticules (particules très fines) ou les perturbateurs hormonaux, mais aussi en faire disparaître certains (amiante interdite en 1997).

La technologie va plus vite que la santé et que la recherche !
Nous devons redoubler de vigilance et sensibiliser toujours plus ! Notre rôle de préventeur est décuplé par ces nouveaux risques. Nous développons une veille, nous devons observer les effets sanitaires pour être les donneurs d’alerte.

On a commencé à parler de toxicologie environnementale et de pollution ? Que sait-on aujourd’hui ?

La pollution atmosphérique tue plus de gens chaque année dans le monde que le tabac ! 48 000 décès chaque année en France attribués à la pollution atmosphérique selon Santé Publique France.

On a évolué dans notre capacité à analyser les COV (composants volatiles) et on détecte plus de choses actuellement. Ce qui modifie les seuils de tolérance. Des prélèvements réguliers sont faits pour analyser la qualité de l’air par des associations présentes partout sur le territoire depuis 2005.
On pense que ce sont les pics de pollution atmosphérique qui tuent le plus ! Mais non ! C’est la pollution atmosphérique permanente qui tue le plus.

En France, plus de 48 000 personnes décèdent chaque année de la pollution de l’air, ce qui représente 9% de la mortalité en France.
On estime également jusqu’à 27 mois l’espérance de vie perdue pour une personne de 30 ans dans les zones les plus exposées.
Les effets sont plus importants en grandes agglomérations mais les villes de petite et moyenne taille, ainsi que le milieu rural sont aussi concernés.*
(* Étude « Air et Santé : risques pour la santé » par Santé publique France en date du 27/04/2020)

 

Même à de faibles niveaux de concentration, une exposition sur plusieurs années à la pollution atmosphérique peut induire des effets sanitaires bien plus importants qu’à court terme. De nombreuses études montrent un rôle de la pollution atmosphérique sur la perte d’espérance de vie et la mortalité, mais également sur le développement de maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires et du cancer du poumon.

AU NIVEAU CARDIOVASCULAIRE :

une réduction de la variabilité du rythme cardiaque, une augmentation de la pression artérielle et de la coagulabilité sanguine et une progression de l’athérosclérose conduisant au développement de maladies coronariennes (infarctus du myocarde) et d’accidents vasculaires cérébraux.

AU NIVEAU RESPIRATOIRE :

une réduction de la capacité respiratoire, une augmentation de la réactivité bronchique, une croissance cellulaire anormale pouvant conduire au développement d’une broncho-pneumopathie chronique obstructive, de l’asthme, d’infections respiratoires inférieures, et dans certains cas, à un cancer du poumon.

Comment on se protège ?

Si on se base sur les sources officielles de l’ANSES et d’une étude épidémiologique menée en 2016 pour mesurer l’efficacité des masques, ils ne seraient pas efficaces pour nous protéger. L’Agence rappelle l’importance d’agir en priorité à la source en limitant les émissions de polluants.

Comment ?

• Modifier la composition des carburants, diesel et fuel notamment !
• Retravailler les procédés industriels
• Baisser les émissions des chauffages domestiques. Passer aux énergies non polluantes
• Mettre en place des péages urbains pour limiter les déplacements en ville et les sources de trafic
• Protéger encore plus les travailleurs qui sont surexposés : ceux qui travaillent sur les routes, manipulent le bitume, les pompistes des stations service par exemple.

POURQUOI LES MASQUES NE SONT PAS EFFICACES POUR SE PROTÉGER DE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE ?

Quel que soit le masque que l’on porte, pour être efficace il faut savoir bien le poser et bien l’enlever. Savoir l’entretenir et le nettoyer.
L’efficacité d’un masque dépend de sa conception, des performances du filtre dont il est équipé, son adaptation à la morphologie du porteur…
Les masques sur le marché aujourd’hui sont conçus pour protéger des particules fines présentes dans l’air ambiant et ne protègent pas contre les substances présentes à l’état gazeux.